Congrès du PS : Olivier Faure est-il en difficulté ?
« La ligne d'union de la gauche que je défends l'a emporté. » (Olivier Faure, le 28 mai 2025 dans "Le Parisien").
Une nouvelle version de la méthode Coué ? Un internaute lui a répondu : « Si vous restez premier secrétaire, LFI dira que le PS est rentré à la maison et c'est insupportable. ». Le 27 mai 2025, de 18 heures à 22 heures a eu lieu un vote au sein du parti socialiste pour son congrès qui aura lieu du 13 au 15 juin 2025 à Nancy.
Officiellement, les adhérents devaient choisir entre trois "textes d'orientation" mais les socialistes ont des pudeurs de gazelle avec leur ambition personnelle : le premier signataire de chaque texte est en fait candidat au poste de chef, c'est-à-dire premier secrétaire du PS (poste occupé depuis le 17 avril 2018 par le taciturne mélencho-compatible Olivier Faure), et ce vote des "textes d'orientation" est le premier tour de l'élection du premier secrétaire dont le second tour, explicite, aura lieu le 5 juin 2025.
Tout le monde était donc impatient de connaître les résultats... Et la réponse, prévisible, la réponse aussi à mon titre, c'est que tout le monde s'en moque, du congrès du PS !
Car l'information principale, celle que je considère comme cruciale pour les observateurs, c'est le nombre réel de votants : pas des inscrits, plus ou moins théoriques, mais bien des votants, ceux qui ont exprimé un choix (en principe libre et sincère).
Avec le parti socialiste, c'est déjà difficile de connaître exactement les résultats. Au congrès précédent, en janvier 2023, les résultats avaient été serrés et contestés, finalement négociés ! Oui ! Négociés. Apparemment, ici aussi. Lisons précisément le communiqué du 28 mai 2025 : « La commission de récolement, réunie le 28 mai atteste de la validité des résultats ci-après. ».
Cette fameuse "commission de récolement" doit, en principe, garantir la sincérité du scrutin mais semble surtout établir des négociations pour que chaque candidat admette les résultats officiels qui ont été diffusés. Ceux-ci sont d'ailleurs diffusés avec le deuxième chiffre après la virgule. Cette si grande précision me paraît suspecte si bien que je ne reproduirai ces nombres qu'avec un chiffre après la virgule.
Et le premier constat, c'est qu'il n'y a pas le nombre exact des suffrages exprimés. En revanche, on a le nombre des inscrits et des votants. Inscrits : 39 815 adhérents. Votants : 24 701, soit seulement 62,0% de participation. C'est faible pour un parti politique de gens en principe convaincus et engagés.
Pour avoir une idée de l'importance de ces deux nombres (adhérents, votants), il faut prendre la comparaison avec Les Républicains. LR et le PS ont la particularité d'avoir été les deux grands partis gouvernementaux qui se sont opposés de 1971 à 2017, chacun hégémonique dans son camp (droite et gauche), et qui ont été laminés par l'élection du Président Emmanuel Macron. Ils sont encore aujourd'hui hégémoniques dans les collectivités territoriales avec une solide expérience d'élu local, sur le terrain (maires, exécutifs départementaux et régionaux).
Or, LR aussi avait perdu énormément d'adhérents, mais l'enjeu du duel entre Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau avait créé un intérêt important. Résultat : 121 617 adhérents LR et 98 110 votants, soit une participation de 80,7% !
On voit avec cette comparaison que le congrès du PS à venir n'a suscité AUCUN intérêt et les médias n'ont même pas daigné y trouver un intérêt. Il faut dire que ce parti ne représente plus que 1,7% de l'électorat à l'élection présidentielle, ce qui le remet à sa place réelle dans l'échiquier politique.
Alors, y a-t-il quand même un enjeu ? Les résultats étaient à la fois prévisibles et surprenants.
Prévisibles : le combat entre Olivier Faure et Nicolas Mayer-Rossignol n'est pas nouveau (déjà le congrès précédent) et on se doutait bien qu'il reviendrait dans l'actualité un jour ou l'autre. Le troisième candidat, Boris Vallaud, un ambitieux un peu esseulé, joue ici le rôle du troisième larron, un peu comme Arnaud Montebourg, une position de perdant (il n'est pas au second tour), mais une position confortable puisque chacun des deux candidats restants lui proposent des ponts d'or pour un débauchage immédiat.
Surprenants aussi car les scores des deux premiers restent très proches ("officiellement" 42,3% et 40,4%, ce qui fait moins de 500 voix d'écart). Cela n'a pas empêché la direction du PS de crier victoire : « Le texte d'Olivier Faure a réuni la majorité des voix » ! "La majorité des voix" à prendre dans le sens relatif du terme !!
Dans la même phrase, il est indiqué « 42,21% des voix exprimées, sur un total de 24 701 votants » : pourquoi mélanger des serviettes et des torchons, pour donner un nombre absolu de votants et seulement un pourcentage en voix exprimées ? Simplement parce que ces pourcentages, comme dans tous les congrès socialistes (et en particulier au congrès de Reims en 2008), les pourcentages sont "négociés", c'est plus facile à communiquer (même avec deux chiffres après la virgule) que des nombres précis, exacts, qui seraient peu sincères.
Il y a pourtant un enjeu, au-delà des ambitions personnelles, un enjeu certes dérisoire si l'on tient compte de l'audience électorale réelle qu'a ce parti au niveau national (c'est-à-dire très faible). C'est le perpétuel débat entre la gauche bourrin et la seconde gauche, ou gauche moderne. Il se caractérise par Olivier Faure qui avait conclu une alliance électorale avec Jean-Luc Mélenchon en 2022 (la Nupes) et en 2024 (la nouvelle farce populaire), et par Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouen et, en quelque sorte, représentant de ce socialisme municipal qu'on retrouve dans quelques grandes villes et qui se veut pragmatique et social-démocrate, en d'autres termes, qui se veut réaliste.
En fait, plusieurs enjeux se greffent sur ce duel : il y a un courant qui veut sortir Olivier Faure qui a transformé le PS, grand parti présidentiel, en un groupuscule confidentiel. Il est aussi représenté par une aile gauche qui a fait alliance avec Nicolas Mayer-Rossignol. Le choix de Boris Vallaud sera intéressant, entre la volonté de changement (et de renouveau éventuel) et le conservatisme d'un socialisme archaïque (qui reste sur ses acquis d'il y a plus de cinquante ans). À l'occasion de certaines interventions du président du groupe PS sur des questions plus de morale que de politique, on peut lui reconnaître une certaine sincérité dans son engagement politique.
Il y a des chances que les socialistes restent divisés le soir du 5 juin 2025 et qu'une nouvelle "commission de récolement" soit nécessaire pour négocier les futurs résultats (j'adore la démocratie socialiste, c'est bidonnant !). Et en ligne de mire, l'élection présidentielle et la vacuité du parti socialiste, car à l'heure actuelle, personne n'a la stature pour être candidat à l'élection présidentielle. « Plumer la volaille socialiste ne sera qu'un jeu d'enfant ! », selon le grand gourou insoumis. C'est encore une différence avec Les Républicains dont le problème, pour l'élection présidentielle, est justement l'inverse, le trop plein de candidats potentiels.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (29 mai 2025)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Congrès du PS : Olivier Faure est-il en difficulté ?
Congrès du PS : le choc de complexité !
Robert Badinter.
Congrès du PS à Rennes : l'explosion de la Mitterrandie.
La préparation du congrès de Rennes (27 janvier 1990).
Histoire du PS.
Manuel Valls.
Martine Aubry.
Hubert Védrine.
Julien Dray.
Comment peut-on encore être socialiste au XXIe siècle ?
François Bayrou et la motion de censure de congrès du PS.
Lionel Jospin.
Claude Allègre.
François Mitterrand.
Jacques Delors.
Mazarine Pingeot.
Richard Ferrand.
Didier Guillaume.
Pierre Joxe.
André Chandernagor.
Didier Migaud.
Pierre Moscovici.
La bataille de l'école libre en 1984.
Bernard Kouchner.
Hubert Curien.
Alain Bombard.
Danielle Mitterrand.
Olivier Faure.
Lucie Castets.
Bernard Cazeneuve
Gabriel Attal.
Élisabeth Borne.
Agnès Pannier-Runacher.
Sacha Houlié.
Louis Mermaz.
L'élection du croque-mort.
La mort du parti socialiste ?
Le fiasco de la candidate socialiste.
Le socialisme à Dunkerque.
Le PS à la Cour des Comptes.
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